Adrian Jutzet – Biosem

Depuis maintenant 27 ans, Adrian Jutzet vit et travaille sur son domaine dans le petit village de Chambrelien situé entre la réserve naturelle des Gorges de l’Areuse et la ville de Neuchâtel. C’est en 1992 qu’il décide, avec sa femme, de s’installer là, attiré par la vie communautaire qui était déjà établie autour du domaine. La partie agriculture est intimement liée avec l’expérience de vie communautaire, visant l’autosuffisance, la non-violence et le respect du vivant. Les activités agricoles font vivre la vie sociale, Adrian travaille avec des personnes en difficultés que la communauté accueille pour reprendre un nouvel élan dans la vie.. Le jardin de légumes d’Adrian nourrit en grande partie les 15-25 personnes qui vivent dans les 3 maisons du domaine.

En 1994 Adrian décide de se spécialiser dans la production de semences bio. En effet, l’offre en bio n’était pas très développée dans les années 90, il lui parait alors important que le consommateur puisse s’orienter vers autre chose que les graines standardisées de la grande distribution. Avec sa femme il crée Biosem avec un catalogue dans les trois langues nationales ainsi que le premier site en ligne de vente de semences bio, d’outils de production indigènes, de terreau et autres fournitures liées au jardinage écologique. Ils proposent alors un choix de semences de plus de 500 espèces de plantes indigènes et de légumes bio. En partenariat avec la Confédération ils participent à la sauvegarde de variétés anciennes qui sont souvent moins productives mais mieux adaptées à notre climat et à une vision d’agriculture pérenne. Le mot d’ordre du domaine est de faire vivre la biodiversité, de créer un équilibre entre la vie des animaux, des plantes et de l’humain. Ce mode de fonctionnement permet d’utiliser moins de moyens auxiliaires, aucun pesticide ou produit chimique pour maintenir la santé de la plante car grâce à la biodiversité les parasites sont naturellement éliminées par les insectes auxiliaires et le sol sain leur offre une nourriture complète sans avoir besoin d’ajouts.

En 2011, Adrian confie la vente de ses semences à l’entreprise Sativa Rheinau. Après s’être beaucoup investis dans cette expérience, il ne souhaite plus s’occuper de la vente mais préfère retrouver plus pleinement son travail d’agriculteur / maraicher. Le nombre de personnes actives dans la communautée s’étant réduit avec les années, la vie sur le domaine devient plus calme. Aujourd’hui, sa petite ferme, Biosem, compte 18 hectares de terrain. Il y produit des légumes, des fruits d’arbres hautes-tiges (pommes, poires, coings, pêches, prunes,…), du fourrage , des céréales (blé, millet, avoine, tournesol) et semences bio. Il entretient également environ 6 hectares de prairies temporaires et extensives ainsi que des jachères qui font vivre la biodiversité.  Ce qui fait la particularité de la ferme Biosem aujourd’hui, c’est son beau petit jardin en self-service. Après une petite introduction, les clients peuvent venir cueillir leurs propres légumes à tout moment. Ils pèsent leurs cueillettes à chaque visite et la facture leur est envoyée en fin d’année. Ainsi, Adrian n’a pas besoin de cueillir et de gérer des stocks et le consommateur est sensibilisé à la réalité d’une agriculture respectueuse de l’environnement ; tout n’est pas toujours disponible et la taille des légumes diffère de ceux que l’on trouve dans la grande distribution. Ce système basé sur la confiance semble convenir à Adrian ayant de l’espoir en l’honnêteté de l’humain. Il a plus de 300 clients plus ou moins réguliers venant profiter de ce moment de nature, seul ou en famille, pour faire découvrir aux enfants comment poussent les légumes qui sont dans leurs assiettes.

Chaque année il forme un apprenti en maraichage ou en agriculture, et souvent des étudiants suisses allemands viennent aider quelques semaines en été pour apprendre le français et découvrir son monde.

La ferme Biosem livre habituellement à la coopérative des Halles quelques légumes de garde en hiver tels que oignons, patates, courges et du jus de pomme non filtré venant de ses vergers. Suite à une saison difficile, ponctuée de longues périodes de sécheresse, la récolte est maigre et nous n’aurons cette année que des oignons. Nous lui souhaitons le meilleur pour la saison prochaine, qu’il gérera avec sa fille apprentie maraîchère, et le remercions pour son soutien envers la coopérative.

janvier 2020 _ Myriam Laribi
Photos_Carolina Restrepo